Frédéric Beigbeder – L'homme qui pleure de rire [critique]
7/1/2020
Frédéric Beigbeder. Un auteur à part dans le paysage littéraire français. Un dandy adepte des femmes plus jeunes que lui, de la gaudriole, de monde de la nuit, de boissons alcoolisées et de substance illicites (surtout celles qui se sniffent sur le capot d'une voiture devant une célèbre boîte de nuit parisienne). Un auteur qui a donc tout pour me plaire. Un auteur qui me plait beaucoup. Un auteur qui ne m'a (presque) jamais déçu. Un auteur qui vient de me décevoir...
Après la pub et la mode, Octave Parengo est de retour en France pour fustiger les dérives de notre société de divertissement. L'Homme qui pleure de rire clôt ainsi la trilogie du personnage sur les aliénations contemporaines.
L'HOMME QUI SE FOURVOIE
Frédéric Beigbeder est un auteur qui écrit beaucoup sur lui, et c'est l'une des raisons pour lesquelles je l'apprécie autant, moi qui estime énormément le personnage. Frédéric Beigbeder est donc un auteur que j'ai beaucoup lu, et dont j'ai aimé la plupart des livres (L'amour dure trois ans, 99 Francs, Nouvelles sous ecstasy, Un roman français et Oona et Salinger). Mais, car il y a un mais, j'ai été plutôt circonspect en refermant Une vie sans fin il y a deux ans, à moitié convaincu seulement par cet ouvrage hybride, à mi-chemin entre le roman et l'enquête.
Deux ans plus tard, il faut bien se rendre à l'évidence : Une vie sans fin semble avoir été les prémices d'un fourvoiement en bonne et due forme. L'Homme qui pleure de rire est clairement Frédéric Beigbeder et non Octave Parango, son double de papier, avec qui la la frontière de l'incarnation n'aura jamais été aussi ténue. Dans ce nouveau « roman », l'auteur parle clairement de lui et de son éviction de la matinale de France Inter, et règle ses comptes avec certaines personnes. Pourquoi pas, il n'y a rien de rédhibitoire à cela, au contraire. Mais pourquoi le faire sous la « protection » d'un roman ? Non, Frédéric, tu aurais du écrire en ton nom, comme tu l'as fait dans ton roman précédent, comme tu l'as si bien fait dans Un roman français, un texte puissant qui t'a d'ailleurs valu de recevoir le prix Renaudot en 2009. Dans 99 Francs, par exemple, même si tu parlais de toi, tu avais au moins pris la peine de développer une intrigue autour de ce que tu avais vécu. Ici, aucune intrigue – ce texte est un récit, un essai, une autobiographie... Tout ce que tu veux, Frédéric, sauf un roman. Tu m'en vois navré.
Espérons, mon cher Frédéric, que tu sauras redresser la barre et que tu nous fera encore don de romans irrévérencieux et décalés comme tu en as le secret. Rendez-vous dans deux ans.